jueves, 9 de agosto de 2012

LE PROCÈS DE GU KAILAI


RÉGIME ET PARTI COMMUNISTES CHINOIS SOUS PRESSION : Le procès de Gu Kailai lève le voile sur le rôle de Wang Lijun dans le meurtre de Neil Heywood

LE MONDE

Gu Kailai, le 9 août, menée au tribunal de Hefei, où a eu lieu son procès pour le meurtre de Neil Heywood.

Hormis le compte-rendu officiel livré en moins de 7 minutes, jeudi 9 août, à la presse étrangère, rien n'a filtré du procès de Gu Kailai, accusée du meurtre de l'Anglais Neil Heywood. Outre les deux diplomates britanniques présents à l'audience – ils ne se sont pas exprimés publiquement – la plupart des gens qui y ont assisté – une centaine selon les images de la télévision chinoise - sont triés sur le volet, comme il est d'usage en Chine lors des procès sensibles, afin d'éviter toute fuite.

L'un d'entre eux a confié au Monde, sous le couvert de l'anonymat, des éléments essentiels pour comprendre l'affaire Heywood. Ces faits ont été présentés au procès et à l'audience, mais n'ont pour l'instant pas été révélés par les autorités chinoises au grand public. L'entretien s'est déroulé en face à face et l'identité de la personne a été vérifiée par nos soins.

"UN COMPTE-RENDU AVANT ET APRÈS LE MEURTRE"

Le plus spectaculaire de ces éléments est le rôle ambigu de Wang Lijun, l'ex-super flic de Chongqing, dans le meurtre. C'est sa fuite au consulat américain de Chengdu, le 6 février dernier, qui a provoqué le scandale Bo Xilai. Selon notre interlocuteur, "Wang Lijun a été présenté au procès comme la personne qui a dénoncé le crime. Mais il a aussi été présenté comme ayant été impliqué dans l'affaire depuis le début : Gu Kailai lui a fait un compte-rendu avant [le meurtre], et après ".
Le conflit économique présenté comme ayant motivé le meurtre de Neil Heywood a été explicité durant le procès : selon notre interlocuteur, le parquet a présenté les preuves des menaces proférées par Neil Heywood à Bo Guagua, le fils des Bo [qui a fait ses études à Harrow en Angleterre, puis à Oxford et cette année à Harvard]. "Si tu ne me donnes pas 13 millions de livres, tu seras "détruit", a déclaré l'Anglais, selon l'accusation, explique notre source. Ces menaces sont apparues sous la forme d'une lettre (ou d'un courriel ou d'un message), envoyée par Heywood à Bo Guagua. Celui-ci l'a transmise à sa mère, qui s'est sentie menacée".
 
Est-ce alors que celle-ci a fait appel à Wang Lijun ? Au procès, l'accusation a présenté les éléments d'un projet préalable pour tuer Heywood : "Il y a même eu un plan conçu par Wang Lijun, et par Xu Ming [le milliardaire de Dalian, patron du groupe Shide]. L'idée était que Xu Ming appelle depuis Pékin et prévienne qu'un gros dealer de drogue allait être à Chongqing. [Puis que lors de l'opération de police], Heywood soit tué car il a refusé de se rendre. Ce plan n'a pas été réalisé."


Gu Kailai témoigne lors de son procès, le 9 août.
L'ORIGINE DU POISON RESTE INCONNU

Lors du procès, il a été dit que le rôle de Wang Lijun serait traité dans un procès séparé. En revanche, explique notre interlocuteur, "l'un des points saillants, c'est qu'ils n'ont pas trouvé où Gu Kailai s'était procuré le poison. Il n'a pas été dit que c'était du cyanure [alors que cette possibilité a été mentionnée dans la presse étrangère]. Il est possible que la substance vienne d'un dératiseur, mais il n'y a pas de cyanure dans ce genre de pesticides".

Au procès, Gu Kailai n'a pas fait de déclaration, mais a simplement avoué avoir commis le meurtre de Heywood. Dernier point révélé par notre interlocuteur, " l'évaluation psychiatrique considère que Gu Kailai est en mesure d'être légalement responsable de ses actes. Mais, en 2011, selon deux témoins cités lors du procès, Gu Kailai n'est sortie de chez elle qu'une vingtaine de fois durant toute l'année, car selon eux, elle soignait une dépression"